Christine JOLI (Cadre ETP et Parcours MRC), Florence FAUROUX (Infirmière), Agnès HAUTH (Diététicienne), Lola MALDERA (Diététicienne) ont participé à une réunion à Pont à Mousson, à l’initiative du Réseau Néphrolor pour parler du traitement conservateur de la maladie rénale chronique aux stades 4 et 5.
Christine JOLI, répond à nos questions sur cette intervention :
Qu’est-ce que ce que le traitement conservateur ?
« Le traitement conservateur est un traitement de confort à la fois physique et psychique, qui vise à soulager les symptômes (respect de la qualité de vie), à préserver la fonction rénale résiduelle (néphroprotection) le plus longtemps possible, et à accompagner le patient vers une fin de vie ».
C’est une option thérapeutique en cas d’IRC (insuffisance rénale chronique) et non une abstention thérapeutique, sans suppléance (sans dialyse ou greffe) proposée aux patients de stade 4/5 en décision médicale partagée et selon certains éléments d’orientation médicale et/ou choix de vie, sans limite d’âge et modifiable à tout moment vers un choix de dialyse.
« Selon les recommandations KDIGO 2015, le traitement conservateur est a priori indiqué dans les circonstances suivantes :
– espérance de vie inférieure à 3 à 6 mois ;
– anticipation d’une intolérance au traitement par dialyse ;
– choix de la personne atteinte de MRC après information adaptée/partagée.
La prise en charge en traitement conservateur nécessite un parcours de soins personnalisé et coordonné au sein d’un réseau pluridisciplinaire. Il est piloté par l’équipe de néphrologie en lien avec toute autre profession de santé impliqué dans la prise en charge. Cette dernière peut durer de quelques mois à plusieurs années. »
Publication de juin 2022 par la SFNDT dans le guide pratique » Traitement conservateur de la maladie rénale chronique stade 5″, dans Néphrologie & Thérapeutique
SFNDT – Société Francophone de Néphrologie, Dialyse et Transplantation.
Pourquoi vous a-t-on sollicité toutes les quatre ?
Au départ, j’ai été sollicitée seule mais en raison d’une prise en charge multiple, j’ai demandé à venir avec une partie de l’équipe pour partager notre expérience professionnelle.
C’est depuis 2018 que l’équipe ETP ASA prend en charge des patients faisant ce choix de traitement conservateur sans dialyse (infirmière, diététicienne, psychologue et néphrologue) représentant 6 % des choix des patients.
Quelle est la place de l’ETP dans cette prise en charge ?
La prise en charge du traitement conservateur sans dialyse par une équipe ETP est assez novatrice : adaptation de notre programme ETP « mieux vivre avec une MRC » (autorisé par l’ARS depuis 2010).
Nous pouvons la proposer :
– au décours d’une CS néphrologique en vue de préparer les patients vers un choix de traitement de suppléance (hémodialyse, dialyse péritonéale et greffe rénale) ou un traitement conservateur sans dialyse.
– via la réalisation d’un atelier éducatif spécifique (création 2022) : « je m’investis dans mon traitement conservateur » avec une échelle d’adhésion au projet de soin choisi par le patient.
L’ETP a une place majeure : c’est une approche centrée sur la personne, holistique et personnalisée, évaluation des difficultés, attentes et besoins exprimés du patient (accompagné d’un proche, un aidant) et surtout, écoute de son projet de vie en lien avec un projet de soin : vivre sans dialyse, grâce à un accompagnement médical et pluridisciplinaire, favorisant le maintien du patient à domicile.
Nous collaborons avec l’assistante sociale, la médecine de ville et tous les partenaires gravitant autour du patient afin de permettre une continuité de suivi.
Quels résultats/bénéfices vos patients ont-ils perçus ?
Depuis 2018, 98 % des patients choisissant cette option sont satisfaits du projet de soin établi par décision médicale partagée.
Moins de 5 % changent d’avis vers la dialyse : sachant que tout patient a la possibilité de changer d’avis.
Les bénéfices sont multiples en termes de qualité de vie :
• Connaissance de toutes les options thérapeutiques possibles
• Diminution de l’anxiété
• Philosophie de vie : vivre sans dialyse chez les patients majoritairement âgés (94 % des plus de 70 ans, la moitié des plus de 85 ans dont un quart des plus de 90 ans)
• Absence des contraintes temporelles et des soins techniques des dialyses,
• Diminution des déplacements hospitaliers,
• Gestion à domicile de leurs symptômes d’IRCT par le néphrologue et le médecin traitant
• Maintien à domicile favorisant leur mode de vie socio-familial …
Quelle est la place de la diététique dans cette démarche ?
En plus de l’accompagnement infirmier et psychologique, les diététiciennes adaptent la prise en charge nutritionnelle, dans le temps, pour chaque patient par :
• Une connaissance de son mode de vie, entourage
• L’évaluation de son état général, autonomie et apports nutritionnels
• L’élaboration avec le patient des objectifs de sécurité (prévention de la dénutrition, retarder le syndrome urémique et l’apparition de symptômes avec un apport contrôlé en protéines, éviter une hyperkaliémie, une surcharge hydrosodée…)